Les lieux du voyage : une fiction romantique. L’exemple du Rhin de Victor Hugo
Abstract
Les voyageurs de l’époque romantique sont ceux qui, en France, donnent le plus constamment une
dimension imaginaire aux lieux qu’ils parcourent. Les distorsions du paysage, les changements de nature qu’il
subit, mais aussi parfois la volonté de ne pas céder à la tentation de l’illusion et de la métamorphose du réel,
rendent compte entre autres des modalités d’affabulation et de réinvention du pays par l’écriture. Les
paysages et monuments offrent des possibilités narratives nombreuses, bien au-delà de la transposition d’art
ou de la rêverie poétique sur le lieu, ouvrant sur des récits possibles sitôt interrompus qu’esquissés. Le voyage
apparaît ainsi comme une stimulation littéraire avant d’être une matière diégétique. Le mélange de récits
légendaires, d’érudition revisitée par l’imagination et de digressions variées n’apparaît pas seulement comme
un trait générique et comme la conséquence d’une confusion définitoire, mais comme un indice de l’hésitation
du narrateur à assumer la réalité du voyage dont il prétend rendre compte. On prendra comme exemple de
lieu réinventé par l’écriture et le fantasme l’Allemagne du Rhin de Hugo